Vive la société ludique ! Vive les mômes et les voyous ! Abolition de la société de classes ! Autogestion de la vie quotidienne ! Ici, bientôt de charmantes ruines. Merde au bon-heur ! Vivez ! N’admettez plus d’être immatriculés, fichés, opprimés, réquisitionnés, prêchés, recensés, traqués ! Chassez le flic de votre tête ! Mangez vos professeurs ! N’obéissez jamais plus ! Ne travaillez jamais ! Ne faites jamais confiance à quelqu’un de plus de trente ans ! Ne prenez plus l’ascenseur, prenez le pouvoir ! Que c’est triste d’aimer le fric. Brûlez les banques ! Vous êtes creux. Vous finirez tous par crever du confort. La vie est ailleurs. Soyez contre tout. Surtout contre vous-même. Oubliez tout ce que vous avez appris. Commencez par rêver. Prenez vos désirs pour des réalités. Soyez réalistes, demandez l’impossible. Ouvrez les fenêtres de votre cœur. Faites la somme de vos rancœurs et ayez honte. Ne gardez pas votre sang-froid. Jouissez sans entraves ! Déboutonnez votre cerveau aussi souvent que votre braguette ! En tout cas, pas de remords !
À propos
C’est le repas du dimanche de trop chez Bernard. Traité une fois de trop d’exsoissantuitarattardé, il explose à la figure de ses enfants (trentenaires bobos écolos gentils tendance Ségolène), et leur montre, en moins de temps qu’il n’en faut pour avaler cinq douzaines d’huîtres que l’ex attardé de 68 a encore le verbe haut, les idéaux intacts, et la fougue de le jeunesse. Une fougue que, de toute évidence, ils n’ont jamais eue.
Moins de vingt pages, explosives, jouissives, qui se dégustent comme une douzaine d’huîtres accompagnées d’un Muscadet bien frais (ou tout autre vin blanc que vous préférez avec les huîtres). C’est vif, vivifiant, intelligent, rageur, et beaucoup plus enthousiasmant, en cette période de commémorations qui ressemblent plus à des enterrements, que tout ce qu’on peut entendre ici ou là.
Du pur Pouy, dès le titre. Mes soixante huîtres, qui d’autre que lui aurait pu y penser ?
Jean-Bernard Pouy en a donc marre de s’entendre qualifier, par sa progéniture, et indirectement, via les médias d’exsoissantuitarattardé. Il répond vertement, avec l’imagination et le verbe qu’on lui connaît. Mais finalement, ces reproches ne sont-ils pas dû, essentiellement à l’envie et la jalousie de ceux qui ont eu une jeunesse trop terne, trop raisonnable, trop lisse ? Qui regrette de ne pas avoir pu participer à une telle fête, quoique l’on puisse penser de ses suites et de ses conséquences ?
Des envieux qui sont loin d’avoir la verve de notre JB national, et qui même, de mon point de vue, s’emmêlent un peu les pinceaux. Parce qu’il faudrait savoir. Et d’un, soit on est attardé, soit on est ex. Si on est attardé, c’est qu’on est resté soixantuitard. Donc exit le ex. Et finalement attardé ça veut dire quoi ? Que 40 ans plus tard on a encore la fougue, la niaque, la rage, l’humour, l’envie de vivre ? Finalement, c’est plutôt un compliment. Ou, une fois de plus, de l’envie et de la jalousie. Car finalement, n’a-t-on pas l’âge de ses idéaux, de ses envies et de ses indignations ?
JM Laherrère, Actu-du-noir