La Guerre de Bom Fim
Publiée avec le soutien du Ministère de la Culture du Brésil - Fondation de la Bibliothèque Nationale - Coordination Générale du Livre et de la Lecture. Aide à la traduction du Centre National du Livre
« Il faut imaginer Bom Fim non pas comme un quartier mais comme un pays. Un tout petit pays. »
Le Bom Fim de Scliar et de son héros Joël est un lieu imaginaire: un coin de Russie ou d’Europe centrale, celui des histoires de Sholem Aleikhem ou des toiles de Chagall, éloigné dans le temps, hanté par les camps, et si présent dans la mémoire collective judaïque. C’est, en même temps, le quartier de l’enfance et de l’adolescence de Joël : le shtetl à Porto Alegre, la vie tranquille et monotone menacée par l’ennemi nazi, aussi par le progrès, les bouleversements de la vie moderne, la dictature (le récit a été publié au Brésil en 1972, en pleine dictature militaire). Bom Fim, c’est aussi la terre de la fantaisie, des tribulations, de la chasse aux Juifs par les goyim, des parties de foot, des attaques et victoires successives. C’est le pays des rêves, pour Joël et pour son frère Nathan, petits-enfants du vieux Léon, l’immigrant venu de Russie, fuyant les pogroms. C’est le monde mythique des super-héros et du golem, de la jument «Malke Tube», du chien Mélâmpio, du bouc Leibl, ou de la chatte Lizl. Sur Bom Fim plane l’ombre de l’écrivain Franz Kafka, symbole, pour Scliar, de la difficulté de vivre et de s’adapter à un monde qui n’est pas le sien, rappel de l’éternelle figure du Juif errant. Comme toujours chez l’écrivain, l’intrusion du fantastique, le recours au conte et à l’allégorie introduit un récit épique et dérisoire, tragique et violent, à l’image de la cruauté du monde.
À propos
Dans le paysage littéraire du Brésil, Moacyr Scliar, occupe une place à la fois majeure et un peu décalée. Fils d’immigrants russes d’origine juive, son œuvre romanesque, très importante, témoigne du mariage de deux cultures : celle du réalisme magique d’un Garcia Marquez et celle, onirique, rêveuse et tragique d’un Marc Chagall. Rencontre tout de suite avec Moacyr Scliar, de passage à Paris pour la parution de « La Guerre de Bom Fim » aux éditions Folies d’Encre.
Paula Jacques, Cosmopolitaine